samedi 21 septembre 2013

C'est sans danger ?




La solitude du coureur de fond.

Décidément, je ne me lasserais jamais de revoir le "Marathon man" de John Schlesinger.
Un nouveau visionnement en DVD et le plaisir reste intact avec ce scénario incroyablement prenant, signé par le grand William Goldman auteur également du roman.
Quand on fait équipe avec le scénariste de "Détective privé", "Butch Cassidy et le kid" ou encore "Les hommes du Président", on ne peut être que plus stimulé et renforcé pour mettre en scène un maître de l'écriture.
Pourquoi le cinéma de John Boorman peut accuser avec le temps de sérieuses marques de fatigue et de lourdeur, et pourquoi le cinéma de John Schlesinger tient-il aussi bien "la route". J'aurais pu citer bien sûr d'autres cinéastes (dans les deux camps) mais j'en reste au cinéma anglais.
Pourquoi donc. En y réfléchissant de plus près, je pense que le cinéma de Schlesinger est plus moderne et donc plus vivant car il faisait partie de la fameuse "nouvelle vague anglaise" (free cinema) dans les années 1960 avec Karel Reisz et Tony Richardson. Il a creusé un tel sillon créatif et novateur pour l'époque, que son empreinte est encore là particulièrement sur la forme.
En revoyant le cinéma de Schlesinger des années 75/80 (Le jour du fléau, Marathon man, Le jeu du faucon) on a envie de re-découvrir ou découvrir tout simplement ses premiers films. Je dis "découvrir" car voir des films de John Schlesinger au cinéma ou à la télévision est pratiquement chose impossible.
Donc je dis allo, allo quoi (référence "Nabillesque") allo l'Institut Lumière de Lyon ou La cinémathèque française de Paris pour un mise en lumière d'une belle et complète rétro Schlesinger. Il ne faut jamais s'arrêter de découvrir.

"Marathon man", c'est la rencontre de tous les atouts. Un roman de William Goldman, scénarisé par lui-même où il ne garde que l'essentiel. Une musique prenante et empreinte de mysticisme signée par le discret Michael Small. Des acteurs fabuleux, Dustin Hoffman (38 ans au moment du film) Sir Laurence Olivier, William Devane (trop rare) et surtout le grand Roy Scheider dans l'un de ses plus grands rôles. Et aussi la participation un peu surprenante dans une telle super-production de "la demoiselle d'Avignon" Marthe Keller dans un rôle ambigu dans lequel elle tire son épingle du jeu.


Is it safe ?

"Marathon man" c'est aussi une histoire de famille et notamment ces deux frères (aux destinées diamétralement opposées) L'espion pragmatique-manichéen (Roy Scheider) et l'étudiant-philosophe un peu rêveur sur le tard (Dustin Hoffman) Deux univers qui vont se mélanger et progresser dans un noeud de vipères, de violence et de meurtres. Le personnage-espion de Roy Scheider y laissera sa vie au milieu d'un rendez-vous fatal avec le "monstre nazi". Mais, il réussira à lâcher son dernier souffle, dans une sublime scène de "rampage hémoglobien" devant son frère, du coup obligé d'appuyer sur la pédale vengeance.

"Marathon man" c'est du polar. En cela, il se rapproche fiévreusement du fameux "Trois jour du Condor" de Sidney Pollack et scénarisé par le même William Goldman. Des personnages de polar hyper construits et des dialogues ciselés avec notamment la réplique "C'est sans danger ?" (Is it safe ?) qui restera un "must' auprès de tous les aficionados du genre. Elle est notamment classée par l'American film Institute au niveau 70 parmi les 100 répliques les plus "culte" de l'histoire de cinéma.

Abebe Bikila.

"Marathon man" c'est en fait la solitude du coureur de fond en référence au chef d'oeuvre d'un autre grand cinéaste britannique Tony Richardson.
Beaucoup de richesse scénaristique, des rebondissements surprenants et intelligents. Un fond d'histoire souvent exploitée au cinéma: la recherche de l'ancien nazi, de l'ancien tortionnaire planqué en Amérique latine et soutenu par une armada d'"amis relais" aux Etats-Unis. Ici, le rôle du dentiste-bourreau interprété par Sir Laurence Olivier, c'est la référence à Mengele (John Schlesinger est né à Londres dans une famille juive de classe moyenne) 
"Marathon man" c'est aussi le jogging à New York. La course éternelle le long des grilles comme si Dustin Hoffman était enfermé dans sa propre folie. Avec son souffle et la pensée permanente à l'immense marathonien éthiopien Abebe Bikila que Schlesinger nous montre magistralement par un document d'époque et qui revient comme un battement de coeur. 

Abebe Bikila remportant pieds nus le marathon olympique de 1960. L'africain est un modèle pour l'américain Babe, le personnage interprété par Hoffman. C'est une source d'inspiration. Babe court pour s'entraîner certes. Le marathon de New York étant son objectif.

Mais au-delà de tout cela, Babe court pour sa liberté.

Guy Malugani.


Tournage du film avec Dustin Hoffman et Sir Laurence Olivier.



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