mardi 23 juin 2015

POUR TON ANNIVERSAIRE de Denis Dercourt (2013)



HAPPY BIRTHDAY TO YOU !

Pour ton anniversaire, je ou nous te réservons une belle surprise et un beau cadeau.
Un beau gâteau avec des bougies et un beau sourire pour accompagner cette célébration.
C'est la résultante de toute fête. Passer un bon moment ensemble, avec une famille, ses meilleurs amis et les amis des amis.
Nous avons tous vécu cela au moins une fois dans notre vie et à des âges différents. Sauf que dans ce film de Denis Dercourt (l'un des cinéastes les plus discrets et plus prometteurs du cinéma français) une fête d'anniversaire peut se transformer au plus tragique et au plus sombre des cauchemars. Un ton dramatique comme dans les meilleurs films de Claude Chabrol.

L'amitié entre ados dans une Allemagne fin années 80 et encore sous l'emprise d'une surveillance de police populaire. Cette amitié qui va être trahie par une rivalité amoureuse mais au-delà de çà par des comportements psychologiques très manipulateurs voir machiavéliques des années plus tard. C'est un axe "Chabrolien".
Un univers bourgeois imbu de lui-même au sein un milieu bancaire froid et des couples qui s'épient dans un climat de surveillance permanent. C'est un axe "Chabrolien".
Et après il y a le traitement de l'histoire qui nous est racontée sur plusieurs années et en suivant les mêmes personnages et leurs certitudes. 
C'est dans ce traitement que Denis Dercourt est très fort car il arrive à nous emmener dans un angle de l'histoire qu'on ne pouvait imaginer dès le début.  Et nous sommes dans l'univers-cinéma, de la narration, du scénario et de l'image, le tout servi par un casting au top.




LA RÈGLE DU JEU.

J'ai parlé des parallèles avec le cinéma de Claude Chabrol dans mon introduction mais je tiens à respecter le propre univers filmique et surtout musical de Denis Dercourt.
En effet, nous retrouvons dans ce film la présence de la musique classique symbolisée par le piano, chère et fidèle à Dercourt (LA TOURNEUSE DE PAGES, EN EQUILIBRE) A nouveau, le piano est mis en scène comme un axe, un espace de travail et de liberté comme une aire de repos au milieu des turpitudes psychologiques des personnages.
Les rares moments de piano sont profonds et révélateurs dans le non-dit, propre à déclencher des actions nuisantes de la part du personnage endiablé (magnifiquement interprété par l'acteur Sylvester Groth qui jouait notamment le rôle de Goebbels dans "Inglourious basterds" de Tarantino)
La rigueur du jeu de la jeune fille pianiste, personnage central du film et qui indubitablement nous amène à une régle du jeu implacable entre les deux personnages masculins. Rivaux depuis l'adolescence, mais aussi complices "fraternels" au fil des années d'une sorte de pacte faustien qui ne peut se terminer que dans le sang et le feu. 
La magnifique scène de la partie de chasse au milieu du film m'apparait comme la colonne vertébrale du film. Elle me rappelle dans son ambiance et finalité la sublime partie de chasse de "La règle du jeu" de Jean Renoir. Chacun tient son fusil et cherche à viser quelque chose ou quelqu'un avec beaucoup de maladresse tout en sachant pertinemment la personne que l'on veut tuer. Dans cette scène, le femme de Sylvester Groth (jouée par une incroyable Sophie Rois - photo ci-dessus) prend le pouvoir et ira jusqu'au bout de sa détermination.

L'ANGE DE LA VENGEANCE.

Ce personnage qui est resté dans l'ombre tout le long du film, alors qu'il est "l'objet" ou plutôt "femme-objet" du deal entre les deux hommes, va devenir l'ange de la vengeance. La force et la grande maîtrise filmique et narrative de Dercourt est de brouiller les pistes afin d'arriver à un surprenant dénouement qu'Abel Ferrara aurait sans doute apprécié du temps de sa belle époque.
La vengeance est le thème récurrent du film. L'acte de vengeance, la préméditation permanente dans les actes avec en relais une imagination diabolique. 
Pour arriver à concrétiser ces postures, il faut être confiant dans les comédiens et comédiennes que l'on choisit. Le choix des visages et la profondeur de chaque personnage dans le récit. 
Ces jeux dangereux, comme dirait Ernst Lubitsch, il faut savoir les raconter et les mettre en scène. 

Discrètement, Denis Dercourt continue à faire un beau et profond travail de cinéma.
Avec humilité, cette forme d'excellence est bien là, à tous les niveaux.
C'est rare.


Guy Malugani.

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